Charte pour une alimentation collective saine

L’Eurométropole est une collectivité ambitieuse et mérite de trouver sa place dans les villes motrices pour une alimentation responsable durable dans la restauration collective. C’est-à-dire, améliorer l’alimentation non seulement dans les établissements scolaires mais également dans les hôpitaux, les établissements médico-sociaux pour personnes âgées et/ou en situation de handicap et toute autre restauration collective. Les établissements s’engagent dans une démarche de responsabilité sociétale et contribuent au développement durable à travers la mise en œuvre d’actions visant les différents enjeux de l’alimentation, qui sont au cœur des priorités du Programme National pour l’Alimentation (PNA) et du Programme National Nutrition Santé (PNNS). Les établissements signataires de cette charte s’engagent à poursuivre ces objectifs en considérant le repas dans toute sa globalité : de la production, de l’approvisionnement à la lutte contre le gaspillage alimentaire, des impératifs nutritionnels aux préférences personnelles et à la recherche de convivialité, tout en garantissant la sécurité alimentaire des personnes accueillies.

Introduction

Nous partons du constat que la restauration scolaire, et autres restaurations collectives peinent à évoluer vers une nourriture bonne et saine à des prix abordables à Strasbourg. La vie, c’est ce qu’on mange et respire avant tout. Nos enfants méritent beaucoup mieux que ça, et notre responsabilité est totale. Cela doit faire partie de leur éducation.

Bien manger pour bien vieillir, il ne suffit pas de proposer 5 fruits et légumes par jour, si ce n’est pas bon, pas cuisiné, c’est direction la poubelle, et ça coûte très cher à la collectivité sans compter les problèmes de santé qui coûtent extrêmement cher à la sécurité sociale et aux citoyens qui en sont les victimes.  

La ville ayant mis en place depuis 5 ans une commission tripartite sur la restauration scolaire, face à nos prestataires qui proposent une nourriture industrielle en liaison froide, il est difficile de faire évoluer la restauration scolaire vers une assiette écoresponsable. Bien que la Ville soit signataire de la charte d’engagement « Ville sans perturbateurs endocriniens » (1), incluant de réduire leur présence dans l’alimentation, en interdisant à terme l’usage de matériels, pour cuisiner et chauffer, qui en contiennent et en développant la consommation d’aliments biologiques, l’état des lieux dans les cantines est loin d’être satisfaisant. C’est pourquoi il est urgent de mettre en place un autre modèle de restauration dans nos cantines. En effet, seule la restauration sur place avec des aliments cuisinés le jour de leur consommation, permet d’avoir le contrôle sur la qualité et l’origine locale de la nourriture, et de ne plus avoir besoin de recourir aux conservateurs et exhausteurs de goût, nuisibles à la santé.  Il faut réinvestir les cuisines pour valoriser les salariés qui y travaillent et ne se sentent pas utilisés comme des réchauffeurs de plats ou ouvreurs de sachets, mais bien comme des acteurs essentiels dans la vie d’une collectivité.

 L’enjeu, comme le souligne le réseau Un Plus Bio (2), est de mettre le manger mieux « au centre de la transformation des territoires, où la restauration collective serait un levier fondamental » et, devant l’urgence climatique, comme le soulignent d’éminents scientifiques dans un article paru dans The Lancet (3), développer une alimentation à base de protéine végétale.

Afin de parvenir à ce changement de modèle incontournable, il est nécessaire de se fixer des objectifs ambitieux et réalisables (cf. annexe I). C’est pourquoi nous sollicitons les acteurs locaux pour opérer rapidement ce changement de paradigme.

De nombreuses autres villes, certaines dans l’Eurométropole (cf. annexe II), ont d’ores et déjà réussi à proposer des modèles de restauration alternative.

Pourquoi pas Strasbourg et l’ensemble de l’Eurométropole ?

  1. http://www.reseau-environnement-sante.fr/charte-dengagement-villes-territoires-perturbateurs-endocriniens/
  2. https://www.unplusbio.org/

https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-6736(18)31788-4/fulltext

Qui sommes-nous ?

Strasbourg-Ecologie, le Centre Social & Culturel de la Robertsau (CSC ESCALE) et l’Association des Parents d’Elèves Indépendante de la Robertsau (APEIR), soutenues par leurs partenaires, veulent faire entendre qu’il est urgent de changer de modèle de restauration et se rassemblent pour améliorer la restauration scolaire pour la santé de nos enfants. Le modèle de restauration actuel est depuis de nombreuses années construit sur le concept industriel de liaison froide avec de nombreux aliments ultra transformés.

Nous voulons à la fois porter les voix de la société civile, des associations et des collectivités, afin d’échanger nos expériences et nos bonnes pratiques, pour trouver des solutions et agir !

Cette charte s’adresse aux élu.e.s, aux collectivités et aux associations et tout autre organisme faisant de la restauration collective.

Les actions déjà menées ?

  • 2015 Création à l’école de la Niederau d’un groupe de réflexion sur la diététique des repas proposés aux enfants, avec les parents de l’APEIR, les services de la ville et l’élue Françoise Werckmann représentant la ville au conseil d’école.
  • 2016 Vote de la délibération, préparée par le groupe de réflexion, portant sur le renouvellement du cahier des charges de la restauration scolaire ;
  • 2017 Élargissement du groupe de réflexion des parents d’élèves APEIR à l’ensemble des écoles de la ville de Strasbourg et constitution d’une commission tripartie

Notre questionnement est simple :Que souhaitons-nous faire évoluer dans la restauration collective ?
Pour nos enfants, nos travailleurs, nos seniors, et autres usagers ?

Glossaire

  • Alimentation naturelle : Alimentation élaborée à partir de produit brut ayant subi le minimum de transformation et sans produit chimique.
  • Alimentation saine et biologique : Alimentation équilibrée issue de l’agriculture biologique, exempte d’additifs et d’édulcorants.
  • Aliments ultra transformés : Un aliment ultra transformé se caractérise par la présence dans sa liste d’ingrédients d’au moins une substance elle-même ultra transformée, dénommée marqueur d’ultra transformation. Ces substances sont obtenues par synthèse, ou bien par une succession de procédés physiques, chimiques ou biologiques appliqués à des matières premières naturelles et qui conduisent à une forte dégradation par rapport à leur matrice d’origine.
  • Bio dégradable : matières organiques dont la dégradation et la décomposition sont réalisées par des microorganismes comme les bactéries, les champignons ou les algues.
  • Cuisine sur place : Repas confectionnés sur place avec une équipe dédiée et un équipement adapté.
  • Eco responsable : comportement qui cherche à intégrer des mesures de protection de l’environnement dans ses activités, ses principes.
  • Liaison chaude : En liaison chaude, les plats sont préparés en cuisine centrale, puis livrés sur des sites satellites dans les containers isothermes. De la cuisson à la consommation, pour éviter la prolifération des germes, la température des mets ne doit jamais être inférieure à 63°C. Entre le conditionnement et la consommation, les délais doivent être courts.
  • Liaison froide : la liaison froide est un procédé de conservation des préparations avant leur consommation au cours de laquelle les denrées subissent immédiatement après leur cuisson un refroidissement rapide avant d’être stockées à basse température. Elle permet de conserver les plats sur une période de 3 à 5 jours au maximum.

1)  Après leur cuisson, les préparations sont conditionnées en portions individuelles/collectives. La température est ensuite abaissée rapidement de +63°C à +10°C à cœur en moins de 2h.

 2)    Les plats sont ensuite conservés en permanence jusqu’au lieu de consommation à des températures comprises entre 0 et +3°C.

3)  Avant leur consommation, les repas sont réchauffés en moins d’une heure et doivent atteindre au minimum +63°C.

LISTE DES ABREVIATIONS

ADEME : Agence de la transition écologique

APEIR : Association des Parents d’élèves Indépendante de la Robertsau

CLCV : Consommation Logement et Cadre de Vies

PNA : Programme National pour l’Alimentation

PNNS : Programme National Nutrition Santé

Annexes

Annexe I : Les pistes d’action pour réussir à tenir les engagements de la charte                                                                                                                                A

Annexe II : Exemples de restaurations alternatives en France                                                                                                                               D

Annexe I : Les pistes d’action pour réussir à tenir les engagements de la charte.

  • S’inspirer d’un projet phare et/ou solliciter un cabinet d’audit

A l’heure de la loi Egalim, beaucoup de communes se posent la question de leur transition alimentaire. Le manger mieux est au centre de la transformation des territoires, où la restauration collective serait un levier fondamental. Il est nécessaire pour cela de s’inspirer des professionnels ayant l’expertise dans ce domaine pour garantir la viabilité du projet.

La référence à un « projet phare » permettra l’appropriation d’actions déjà en place, pour sortir de la liaison froide industrielle et favoriser la résilience alimentaire. C’est aussi une façon de soutenir ces nouveaux métiers qui ne demandent qu’à se développer.

  • Dresser un état des lieux

Dresser un état des lieux est nécessaire afin de connaître les manques éventuels pour subvenir aux besoins de la demande globale,et de les combler.

  • Fragmenter la demande afin de sortir de l’alimentation industrielle

Il est nécessaire de repenser le système de restauration si nous voulons pouvoir répondre à nos exigences.Pour les grandes agglomérations comme Strasbourg, faire des lots permettra de résoudre un problème systémique pour sortir de l’offre industrielle.

  • Travailler avec les acteurs locaux

Définir les acteurs locaux par domaine (maraîchers bio, logistique, etc.) qui ont leur rôle à jouer dans la restauration.

  • Proposer des produits compostables

Utiliser des produits qui se compostent est une nécessité dans une démarche de réduction de déchets. Un produit rapidement biodégradable par la nature garantit sa qualité. Il permet de faire comprendre le lien direct entre un produit et sa capacité à rentrer dans un cercle vertueux.

  • Recenser les zones cultivables (cf. projet de l’Eurométropole « Cité Fertile »)

La question de l’approvisionnement est cruciale pour se fournir en légumes frais et bio.

La chambre d’Agriculture est un partenaire de collectivités locales, et l’utilisation de sa plate-forme permettrait de se passer partiellement des appels d’offre en passant directement commande auprès de producteurs locaux.

Encourager et développer l’agriculture urbaine tout en facilitant la création d’un réseau d’entraide entre les différents acteurs déjà existants aiderait à cet approvisionnement.

Travailler avec les différents jardins partagés (banque de semences, …)

La volonté d’un bon nombre de citoyens d’agir pour l’auto-production alimentaire et la réappropriation des semences est certaine à Strasbourg. Faisons donc travailler ces différents acteurs ensemble.

Il serait intéressant d’ouvrir un lieu de stockage des graines de tous les jardins citadins et d’échange des techniques et savoir- faire. Ce lieu de rencontre hébergera différentes initiatives, notamment une banque de semences participative strasbourgeoise et eurométropolitaine.

  • Créer une application pour repérer les arbres fruitiers disponibles et donc offerts à tous.

Cette application aura pour objectif de se réapproprier les ressources comestibles inexploitées déjà existantes, et de remettre en avant la notion de bien commun.

  • Planter plus de fruitiers comestibles sur les espaces publics

Planter des arbres dont chacun peut manger les fruits permet d’augmenter la résilience alimentaire d’un territoire tout en favorisant la notion de plaisir gustatif et permet d’apaiser les esprits, notamment en période de crise. Ces plantations pourraient avoir lieu avec les enfants et citoyens de tous âges, ce qui aide à renforcer un lien positif avec la nature, et aide à remporter l’adhésion de tous.

  • Animations éducatives sur place (animation durable, potagers, bacs de cultures, …)

Un travail d’éducation auprès des enfants a déjà commencé et doit s’intensifier. A différentes échelles, la production sur place est envisageable comme support d’éducation, de soins thérapeutiques, d’espaces de rencontre et de détente. Il est important que les consommateurs comprennent ce qu’est un aliment sain et de saison. Ces petits lieux de production rentrent de plus dans la démarche d’agriculture urbaine.

  • Aller vers la neutralité carbone avec un objectif ambitieux pour la fin des mandats municipaux (2026).

Un calendrier d’actions doit être mis en place pour atteindre cet objectif avant la fin du mandat.

Annexe II : Exemples de restaurations alternatives en France

1/ ANNECY.  Dès l’arrivée en janvier dernier d’une personne déléguée à la restauration scolaire, les bacs en plastique ont été remplacés à 100 % par des bacs en inox, la liaison chaude est en cours de réalisation, et la part de l’alimentation en bio et locale passera de 8% à 30% dès janvier 2022. Elle dépassera 50% à la fin du mandat de l’actuelle mairie. L’objectif est de parvenir au plus vite à une alimentation 100% locale.

Dans le cadre de « Parcours environnement », 40 journées mobilisent les agents au développement durable avec les enfants.

La ville d’Annecy s’appuie sur le réseau Un Plus Bio dont elle est membre, et s’inspire de la ville de Mouans-Sartoux.

2/ CAZOULS-LES-BEZIERS est passée en deux ans d’une délégation de service à un prestataire privé en liaison froide à une régie municipale qui prépare des repas 100 % bio en liaison chaude.  Dans la foulée, la ville a obtenu le label En Cuisine d’Ecocert, niveau 3 Excellence

https://www.ecocert.com/fr-FR/certification/referentiel-en-cuisine

https://www.cazoulslesbeziers.com/

3/ MOUANS-SARTOUX a cette particularité d’être la seule en France dont les cantines scolaires servent des plats 100% biologiques, produits sans intrants chimiques. Avec une régie agricole dédiée écoulant les 20 tonnes de sa production annuelle, ayant su mettre en place d’astucieuses solutions d’organisation pour réduire et recycler ses déchets, elle fait preuve d’une exemplarité qui gagnerait à inspirer d’autres initiatives.

https://www.mouans-sartoux.net

4/ MUNDOLSHEIM. La restauration scolaire de MUNDOLSHEIM représente plus de 150 repas par jour, de la manière suivante :

Liaison chaude avec le collège de MUNDOLSHEIM (valorisation d’une activité locale). Pendant les vacances scolaires, c’est une entreprise privée qui prend le relais (centre de loisirs).

À la fin des repas, les enfants vident leur assiette en discernant les déchets inertes des déchets organiques, avec l’aide d’animateurs qui déjeunent avec les enfants, y compris pour les classes de maternelle.

Les déchets sont repris par un agent qui les amène à un agriculteur qui a des poules, donc, hors déchets inertes (il y en a peu) il ne reste quasiment aucun déchet issu des repas de cantine.

5/RUMILLY. Chaque jour, ce sont près de 590 repas qui sont fabriqués et distribués en liaison chaude par le service de restauration municipal à destination des enfants des écoles primaires et maternelles de Rumilly

https://www.mairie-rumilly74.fr/vos-services-publics/ecole-et-vie-periscolaire/restauration-scolaire

6/UNGERSHEIM.  Cuisine centrale Bio locale, repas 100% bio en liaison chaude.

https://www.mairie-ungersheim.fr/village-en-transition/les-21-actions/

7/ Un Plus Bio, premier réseau national des cantines bio. Association de développement des cantines bio en France. Restauration collective biologique, locale, produits frais, de saison

https://www.unplusbio.org

Une association consacrée à l'écologie